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Culture, ma belle mal-aimée

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Cette semaine, j’ai décidé d’écrire sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur, mais qui ne semble malheureusement pas être au centre des préoccupations de notre société : la culture. Pourquoi les humains de la société nord-américaine contemporaine nient leur besoin de culture et de créativité.

« Oui mais on sait bien, vous, les artistes, c’est juste ça qui vous intéresse! » Si j’avais eu une piasse chaque fois que j’ai entendu ça…

Le statut d’artiste implique que c’est mon métier et donc ma façon de gagner ma vie, mais est-ce qu’être artistique, c’est seulement pour les artistes? Je pense que la créativité est vitale pour notre espèce. Sans elle, nous n’aurions jamais découvert le feu, les outils, bref, nous n’aurions pas évolué. La créativité est alimentée par la curiosité. Le besoin de comprendre, d’aller plus loin, de construire pour, en fin de compte, améliorer notre qualité de vie. La culture va cependant bien au-delà de ça. De mon point de vue, la qualité de vie est l’équilibre entre deux opposés : le confort et le divertissement. Le repos et l’excitation. L’art a cette particularité de jouer dans les deux zones.

Ce n’est pas pour rien que les arts sont enseignés dans les écoles, même si notre gouvernement semble l’oublier et les menace de disparition autant qu’il menace nos pouponnières de bélugas. Les preuves de l’utilité de cette éducation ne sont plus à faire. Faut-il rappeler que le fait de lire la musique est une des seules actions qui activent simultanément la partie gauche (artistique) et droite (rationnelle) du cerveau, réduisant parfois certains symptômes de certaines maladies cognitives comme l’Alzheimer? (www.francemusique.fr) Que le fait de tenir un pinceau et de laisser aller son imagination a des vertus anxiolytiques? Que lire une pièce de théâtre et tenter d’incarner un personnage nous force à examiner des concepts philosophiques, historiques, comportementaux?

Sans parler de la passion. Cette passion qui garde plusieurs jeunes à l’école en leur donnant une motivation dans leur semaine tout en leur apprenant la discipline et le travail acharné. J’ai eu la chance d’avoir une éducation durant laquelle la pratique des arts était encouragée et valorisée. Cela a sans doute contribué à mon choix de carrière, mais la plupart de mes amis, même ceux qui appréciaient les cours de musique, d’arts plastiques et d’art dramatique, n’ont pas continué à pratiquer ces activités une fois leur scolarité terminée. La culture, on peut la consommer ou la produire et je ne pense pas qu’on soit obligé de savoir jouer du piano pour aimer en écouter, mais le fait d’avoir d’effleuré cet univers augmente certainement les chances de s’y intéresser en tant que public.

Bien sûr, nous pouvons blâmer la paresse : nos emplois drainent notre énergie, alors le soir venu, nous avons besoin d’un minimum de stimulation intellectuelle. Nous choisissons de regarder un épisode (ou dix) d’une série à succès suggérée par Netflix ou de gober ce que la télévision nous offre au lieu de prendre le journal et de regarder quelle pièce est à l’affiche dans le théâtre du quartier, quelle exposition a l’air intéressante ou s’il y a une soirée de musique ou de poésie dans un café ou un bar à proximité. Souvent, ça implique un déplacement.

C’est une question de choix. On encourage la pratique du sport à tout âge, mais pourquoi pas les cours d’art? Est-ce que suivre un cours de peinture est réservé uniquement aux enfants et aux retraités? Imaginez-vous dire à vous amis que vous avez commencé à suivre un cours de danse contemporaine ou de poterie. Appréhendez-vous leur réaction? Il y a une pudeur collective par rapport au fait de pratiquer un art. Facile au Québec de qualifier quelqu’un qui consomme la culture de snob ou d’élitiste.

La définition de l’art en est une qui varie énormément. Je ne suis pas de ceux qui condamnent systématiquement les succès commerciaux en les privant des lettres de noblesse de l’Art, mais je pense qu’il est important de faire une distinction entre le divertissement et la culture et de s’interroger sur notre besoin de l’un et de l’autre. L’art n’a pas pour but de plaire. Une œuvre touchante provoque un questionnement, une émotion, un trouble, une révélation, ce que le divertissement ne vise pas nécessairement. Ce dernier a un but commercial. On nous vend quelque chose.

Comme la culture n’est pas une priorité, on ne veut pas investir là-dedans. Investir dans les arts peut d’ailleurs sembler contradictoire, puisque le but n’est pas de plaire à tout prix. Souvent, le résultat de cet investissement n’est pas visible rapidement, alors que la rapidité est le mot d’ordre du 21e siècle. Rapidité et profit. Il faut sûrement rappeler qu’un dollar investi en culture en rapporte vingt. Par contre, pour faire cet investissement, il faut être prêt à prendre un risque, ce qui est difficile à faire lorsqu’on est motivé uniquement par le gain immédiat. Alors, on va vers la valeur sûre. La culture elle-même prend peu de risques (quand on regarde les programmations des théâtres, les têtes d’affiche à la télévision et au cinéma, par exemple). Le financement et les plates-formes de diffusion reviennent donc souvent au même. Le domaine des arts en est un qui se dévore de l’intérieur, victime de son manque de popularité sociale.

Pour ramener la culture au centre des préoccupations de notre collectivité, je ne vois pas d’autre solution que d’en parler. Aux enfants particulièrement, mais aussi aux adultes qui sont absorbés par leur train-train travail-Facebook-Netflix-resto-dodo et qui passent peut-être à côté de quelque chose d’enrichissant.

Cette semaine, toi qui me lis, fais quelque chose pour moi : prends un risque. Va au cinéma voir un film, pas Batman vs Superman, mais peut-être un film québécois, avec des acteurs que tu ne connais pas, mais qui a un titre qui t’inspire. Ou va chiller à la bibliothèque. Ouvre un livre. Va au musée le jour où c’est gratuit. Va chercher ta guitare pleine de poussière et gosse dessus. Pis si tu es vraiment, vraiment game, inscris-toi à un cours de claquettes. Je te promets de faire la même chose.

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