crédits: unsplash
Tu vis ta vie paisiblement. Tu navigues à travers les jours, les mois, les années en réussissant à ne pas trop chavirer malgré les vagues qui sont parfois houleuses. Ton bateau est fort et il encaisse les coups, te protégeant du mieux qu’il peut des intempéries.
Un jour, à force d’avoir été trop secouée, la coque de ton bateau se fissure légèrement. L’eau commence tranquillement à s’infiltrer. Tu vois les gouttes sur le plancher, mais tu en fais fi. Tu te dis que c’est normal, il a beaucoup plu hier. Ça va finir par partir.
Petit à petit, la fissure s’agrandit, se présentant maintenant sous la forme d’un trou. Ce ne sont plus que de simples gouttelettes qui traversent ton embarcation. Tu commences à angoisser. L’eau est froide et encombrante. Elle t’empêche de faire certaines choses que tu aimais pourtant faire avant. Tu essaies de régler le problème par toi-même au lieu de demander de l’aide à une personne spécialisée dans la réparation navale. « J’suis capable tout seul. », te dis-tu.
Plus le temps passe, plus le trou grossit et plus ton bateau se remplit. Comme les passagers du Titanic, tu es maintenant en mode survie. Le froid glacial nuit au bon fonctionnement de ton corps. Tu éprouves une fatigue incommensurable. Tu as de la difficulté à respirer tellement l’eau que tu avales prend de l’espace dans tes poumons. Tu penses de plus en plus à te jeter en bas du bateau. De toute façon, on va tous mourir un jour. Personne ne va se soucier que tu ne sois plus là comme ils ne se préoccupaient déjà pas de voir ton bateau couler. Mais tu as tout faux.
Pendant tout ce temps, tu as ramé d’arrache-pied et tu te tuais à sortir l’eau de ton bateau pour t’assurer que personne ne voit qu’il avait une faiblesse. Tu n’as jamais demandé d’aide et tu as géré l’inondation du mieux que tu as pu. Sauf que maintenant, c’est ton corps qui est inondé de fatigue. Tu ne peux plus t’imaginer qu’après la pluie vient le beau temps. Désespéré, tu sautes à l’eau et tu te laisses couler jusqu’à ce que tes yeux se ferment pour toujours.
Enfin, tu peux nager dans une mer calme et chaude.
Personne ne comprend ce qui s’est passé. Ton bateau avait l’air de si bien flotter. Tous t’enviaient.
Si seulement ils avaient su…
La dépression, c’est franchement épuisant. Ton corps tout entier en subit les conséquences.
Ta motivation est inexistante.
Tes activités préférées ne le sont plus.
Ton travail, tes études, ta famille et tes amis ne sont plus tes priorités.
Tes batteries sont vidées. L’énergie n’est plus de la partie. Ton seul souhait est de rester couché pendant une semaine entière. Mais tu ne dors plus. Ta tête tourne trop en se créant des scénarios d’horreur qui n’arriveront probablement jamais.
Tu as l’impression qu’un dix-roues t’a passé sur le corps. Il est endolori, même si tu es resté assis toute la journée sur ton divan à manger pour combler ton vide intérieur.
Tu ne manges plus. Tu manges trop.
Tu broies du noir. Tu ne vois pas la lumière au bout du tunnel.
Mais tu veux bien paraître. Alors tu prends les quelques petits morceaux d’énergie qu’il te reste et tu sors de chez toi. Tu te dessines un sourire et tu fais comme si tout allait bien. Tout le monde te trouve rayonnant. Tu les remercies du compliment en bouillant de l’intérieur. Tu as une seule envie, leur crier que ça ne va pas. Que tu es au bout du rouleau. Que tu n’en peux plus. Mais ton orgueil et les préjugés inculqués par la société prennent le dessus. Tu retournes chez toi en souffrance.
Et ça recommence le lendemain.
Ne laisse pas ton bateau couler. Avant de frapper l’iceberg, demande de l’aide. Ce n’est pas honteux de sonner l’alarme, même si j’ai moi-même pensé longtemps le contraire.
Tu mérites de naviguer,en toute quiétude, dans un beau et solide bateau.
Et si jamais quelqu’un vient à te demander de l’aide pour réparer le sien, écoute-le, aide-le et réfère-le aux bonnes personnes. On ne sait jamais combien de temps il lui reste avant d’être complètement submergé.