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Le corps d'la femme

Vous vous souvenez du jeu Opération? Celui du patient, infesté par-ci par-là, de petits problèmes à opérer délicatement, sueur sur le front. On s’en voulait tellement de rater notre coup, de toucher les bords, de faire sonner le buzzer. Il était là lui, tout nu, à attendre qu’on répare son corps de ses petits accros. Je voulais parler du corps de la femme, sujet de l’heure dans les blogues féministes, après peut-être Hilary… Je voulais en parler pis c’est cette analogie-là qui m’est venue. Un jeu avec un bonhomme disséqué, un corps ouvert, blessé.

Je nous trouve crucifiées nous autres, les filles. Y’a quelque chose avec notre corps qui dérange le monde. Qui dérange certains hommes, y’a pas à dire, mais même d’autres femmes. C’est probablement ça le plus triste. Une fille ne suit pas les standards pis BEDANG! Pis en même temps, une fille qui les suit à la lettre, pis qui va jusqu’à subir une chirurgie plastique, ben BEDANG pareil… Y’a comme un petit problème icitte, dans notre façon de gérer nos préjugés pis nos jugements.

J’ai deux exemples ben flagrants de filles sacrifiées dans les médias récemment. Safia, pis Soraya. Une s’est fait juger gravement, parce qu’elle avait mis des jeans pis un t-shirt. Gnu gnu, oui dans un gala, mais franchement, en quoi c’est de nos affaires? L’autre, suite à une agression sexuelle en direct à la télé française, s’est fait accuser de trop avoir montré ses boules… J’ai vu ça de mes yeux vus, des commentaires qui critiquaient ses décolletés, ses implants, son look. « Elle avait qu’à pas les montrer ses lolos. » L’animateur, Cyril Hanouna, et l’agresseur, Jean-Michel Maire, ont même minimisé l’incident. Juste non. Je comprends pas pourquoi faut le redire aussi souvent. Dans ce cas-ci, porter un décolleté, probablement comme uniforme de travail dans une émission à la base sexiste, n’est pas un incitatif aux baisers, encore moins sur le chest. Personne ne cherche à se faire agresser ok. Personne, non plus, ne cherche à se faire traiter de grosse sale.

Faut pas se méprendre, y’a quelque chose qui change, je trouve ça beau ce qui se passe en ce moment. La libération des corps, de toutes les grosseurs, couleurs, de tous les genres, poilus pas poilus, maquillés ou pas, travestis de toutes les façons. On voit des beaux étendards partout pis souvent. Ici-même sur la Fabcrep.

Mais chaque fois que je vois une maudite dire que certaines filles portent des culottes trop petites pour elles, des vieux pervers dire qu’une fille s’est habillée trop sexy pis qu’elle l’a cherché, j’ai mal par en dedans. Creux, profond-profond, dans mon âme.

Nos ventres choquent, nos vergetures aussi, notre acné, nos petits ou trop gros seins, notre sexualité… Si une fille fourre pas, elle passe pour une frigide, si elle couche avec beaucoup d’hommes, elle se fait slutshamer. Marie, ou ben Marie-Madeleine, on s’en sort juste pas des références cathos.

C’est « tof » des fois de s’assumer là-dedans. Y faut, mais c’est « tof ». C’est tellement facile de se faire dire que notre jupe est courte ou que nos cheveux son gras… Qu’on est trop affriolantes ou trop cachées…

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On en a eu plein le « cass’ », au début du mois, devant l’accumulation de cas de manque de respect du corps de la femme. On a été dégoûtées de l’accueil réservé à Alice Paquet dans les médias, écœurées des réponses courtes, futiles et fuyantes du recteur de l’Université Laval Denis Brière concernant les agressions sur le campus, affolées par l’affaire Soraya Riffi, enragées de voir que la liste des victimes autochtones ne fait que croitre sans que personne ne s’en aperçoive…

Un mouvement de ras-le-bol a amené les Québécoises à manifester leur mécontentement dans les médias ou lors de manifestations, et a amené la présidente du Conseil du statut de la femme (CSF), Eva Ottawa, à demander une stratégie d’action rapide de la part de la ministre de la Condition féminine Lise Thériault, stratégie d’ailleurs attendue depuis 2013. Quelques jours après la demande du CSF, Françoise David, porte-parole de Québec Solidaire, affirmait que la ministre allait se mettre sur le dossier.

Malgré tous ces cas d’agressions, il s’en trouve malheureusement encore certains pour accuser les filles de ne pas coucher avec les bons gars, de se faire enfiler par n’importe qui, de le chercher, de faire exprès, … Beaucoup refusent de croire les victimes, certains veulent protéger la réputation des agresseurs, d’autres, comme dans le cas Riffi, accusent les femmes de trop en montrer.

Pour vrai, j’ai juste envie de crier comment le monde m’écœure. Après, qu’on vienne me dire que la culture du viol est un concept aberrant et trop gros.

On vit dans un monde où la femme est lynchée. Je ne parle même pas de très loin de chez nous. Je parle d’ici, à côté, en dedans…

La christ, la criss de christ, elle est partout. Faut plus être muette. Ni aveugle. Pis on va le faire, comme des grandes, sans sauveur.

***

Source photo de couverture

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