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Les restants d'une fréquentation

La poutine déjeuner, ça me fera toujours penser à toi

Il t’a convaincue de cuisiner ça, un samedi midi/matin. Vous vous êtes obstinés sur la sorte de sauce, hollandaise ou BBQ. Vous avez fait des recherches poussées sur le sujet. T’as insisté pour mettre des tonnes de légumes ; il est allé trop intense sur le chorizo.

T’as pensé un moment que ça aurait pu être une recette de comfort food de couple, préparée dans un moment sweet de comédie romantique. Juste quelques secondes, comme un flash.

Il te reste pas de grandes vérités de cette expérience, ni de révélations, d’illuminations. Tu n’es pas devenue une meilleure version de toi. T’as rien vécu de trop immense, à faire arrêter l’espace temps. Pendant ces quelques semaines, (ces quelques mois si tu as poussé un peu ta luck), t’as juste profité, vécu les minutes et les secondes et surtout, ne t’en veut pas trop pour ça. Ça t’a fait du bien de ne pas avoir de plans, de ne pas appréhender, de ne pas te demander où ça irait. Tu savais que vous fonciez dans un mur, mais la route était belle et le vent dans tes cheveux mettait un peu de sparkles dans ta vie. Des p’tits, qui brillent pas trop, juste pour dire.

Tes amis étaient contents pour toi au début, comme on est heureux quand un célibataire VOIT quelqu’un. Après quelques semaines, ils ont bien VU que ça n’avait pas d’allure. Que vous deux, ça ne finirait jamais en un NOUS. Y’en a des personnes sages qui t’ont quand même dit : tant que ça te fait du bien.

Il te reste des moments, comme des polaroids du quotidien, avec un filtre Instagram (parce que ça sort toujours mieux) : une rando de nuit à la frontale, une marche dans le froid, des constellations, des recettes des pâtes, des théières, des films sur Netflix. Des danses dans la cuisine, des tounes au piano. Tu lui as fait faire des activités que tu aimes – aller à la librairie. Il t’a fait écouter des vidéos absurdes d’animaux drôles que tu ne trouvais pas drôles d’habitude. Pis t’as ri.

Il a cogné à ta porte, dans ton repère de lonely girl, et est un peu entré dans ton quotidien. La routine s’évaporait. Maintenant que c’est fini, dans ta boîte étiquetée « fréquentation », y’aura ces souvenirs qui resteront avant de s’autodétruire. Un peu, pas mal de nostalgie, surtout au début de la fin. Mais ça aussi, ça va passer.

T’as fini ça en grattant le fond d’un pot de Häagen Dazs. T’as réalisé que trop s’accommoder, trop être chill, trop ne pas être dérangé de rien, c’est pas mieux. T’es un vrai caméléon, tu fit avec tout le monde. Tu fondais comme de la guimauve quand tu le voyais, mais tu prenais sa forme qui n’est pas la tienne tellement tu t’adaptes bien.

T’aurais voulu qu’il te trouve merveilleuse, passionnée, aventureuse, courageuse, différente. Pas juste un peu cool, un peu jolie, un peu smatt. T’aurais voulu lui enlever le goût de magasiner ailleurs. Pas qu’il te dise que, si « jamais ça adonne… », pendant son voyage en Australie, « une surfeuse ou deux, ce serait pas mal ». Tu lui aurais lancé un koala par la tête.

Il aurait dû être fier d’être avec toi. Pas qu’il te swipe la face comme des dizaines d’autres. T’aurais voulu être sa raison d’arrêter de swiper.

Maintenant que c’est fini, y’a des restes de sa musique dans ton téléphone.

Peut-être une photo dans un fichier obscur de ton ordi. Tu pensais que t’avais les yeux brillants quand tu l’avais vue, mais maintenant que tu regardes bien, tu réalises que c’était pas ça. C’était pas LE glow.

Ça s’est pas rendu à un t-shirt emprunté ou une brosse à dents dans un verre.

À des mots griffonnés de son écriture de gars tout croche collés sur le frigo (ça lui prenait parfois des jours répondre à tes textos). C’était pas assez cute pour ça.

Ça s’est peut-être rendu à des présentations moins qu’officielles. Je te présente X – prend vite une gorgée de vin parce que j’ai pas l’intention de préciser le statut qui nous unit, X et moi.

Pour quelques temps encore, tu penseras à des restes de films, écoutés sur des divans, dans des lits ou des matelas sur le plancher (si y’avait pas trop de cash). Des finales de sports te feront penser à lui. Ses spécialités aussi, style ses gaufres ou ses paninis.

Les restants vont s’effriter, pis un jour y’aura juste des miettes de flash back.

Ta mère, pour te rappeler que c’était clairement pas le bon pour toi (tu vas lui dire que c’était quand même mieux que de vagabonder sur Tinder ; elle répondra : « C’est qui, Tinder ? »). C’est pas tout à fait ça : le temps que tu l’as fréquenté, c’était le bon. Fallait juste pas que ça s’éternise.

Tu le sais pas encore, mais un samedi pas si lointain, tu vas aller déjeuner avec ton nouveau copain, LE real, qui te fait sentir comme un patrimoine immatériel de l’Unesco. Qui te fait de la soupe poulet et nouilles quand tu as le rhume. Avec qui tu ferais du bungee  les yeux fermés en Uruguay s’il te disait que c’est safe. Un gars qui peut faire disparaître les grands conflits de ce monde, ou seulement tes tracas de ta journée, juste avec sa voix au bout du fil.

Un samedi matin doux de même, passé avec ce lover dans un dinner kitsch que vous aimez, tu vas ouvrir le menu. Tu vas voir la poutine déjeuner. Tu vas juste sourire en coin (c’est toi qui a gagné avec la hollandaise) pis tu commanderas autre chose.

Granola yogourt grec et fruits, c’est tellement plus toi.

Par Josiane Regimbal

Crédit couverture

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