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Face à mon anxiété à La Malbaie

J’ai toujours envié ces personnes qui partent en voyage seules en rassemblant le strict minimum dans un back pack, en parcourant les auberges de jeunesse, dans un pays qui leur est inconnu. Toutefois, je n’ai pas encore eu ce genre de courage, puisque j’ai l’impression d’être bloquée par mon anxiété.

Pour remédier à ce blocage, j’ai donc décidé l’été dernier d’y aller lentement mais sûrement, en commençant par un petit trip à La Malbaie. On va se le dire tout de suite, ce n’est pas parce que je me suis éloignée à une vitesse de 100 km/h, à 4 heures et demi de route de distance, que je suis parvenue à semer mon anxiété. Oh que non! Elle a été suffisamment tenace pour me suivre et devenir très envahissante dans mes pensées. Pourtant, ma voiture roulait bien, la circulation était fluide, mais tout se passait dans ma tête. J’avais quelques inquiétudes face à ce petit voyage. Des inquiétudes à priori normales, mais qui, dans mon esprit, pouvaient prendre des proportions démesurées. Mais j’ai continué de rouler.

Lorsque je suis arrivée à destination, j’ai récupéré mon sac à dos à l’arrière de ma voiture et je me suis dirigée vers mon lieu d’hébergement. J’avais réservé quelques nuits dans une sympathique auberge, mais malgré le charme de l’endroit, la propreté des lieux, et une vue plus qu’apaisante sur le fleuve, j’ai dû tout de même me confronter à ma grande crainte d’y trouver ces minuscules mais envahissantes… punaises de lit. Ce fléau qui affecte même les hôtels les plus luxueux! Ce fléau qui, finalement, n’a qu’envahit mon esprit, dans ce cas-ci…

Fort heureusement, je n’ai pas eu la moindre manifestation, pas la moindre piqûre. D’ailleurs, je sais que les p’tites bibittes ne mangent pas les grosses (et qu’on ne retrouve pas systématiquement des punaises dans tous les hébergements de ce monde, bien au contraire!)… Mais disons que ce n’est pas le genre de « souvenir » qu’on veut ramener à la maison. Et malgré qu’il est tout à fait normal de prendre certaines précautions pour éviter d’en rapporter, mettons que j’y suis allée à fond! Mon idée en soi n’était pas si mauvaise, mais… je vous explique.

Aussitôt arrivée dans ma chambre, j’ai déposé mon sac à dos (SURTOUT PAS SUR LE LIT, SEIGNEUR!!!) sur un petit bureau pour en sortir d’immenses sacs Ziploc. Pas ceux qu’on retrouve à l’épicerie pour des p’tits lunchs. Non. Ceux prévus pour le rangement, prêts à accueillir le quart d’une garde-robe! J’vous jure que je voulais tout sceller pour empêcher cette vermine de se loger dans mes vêtements, souliers, bref, tout ce qui est composé de tissu. Même mon sac à dos y est passé. Par contre, quand est venu le temps d’enlever mes souliers, j’étais à court de Ziploc et je les ai déposés dans le même sac que celui où j’avais mis mon back pack. ERREUR!

Le lendemain, mes vêtements étaient imprégnés d’un étrange mélange d’odeurs, soit celle du shampooing (qui c’était quelque peu renversé) et celle de… jus de pied. Même si « la bonne odeur » annulait en quelque sorte « la mauvaise », bah, disons que j’ai ajouté la buanderie à ma liste « d’attraits touristiques » à visiter!

Bref, première leçon à en tirer, si t’es assez motivée comme moi pour tout « ziplocquer » ton stock, prévois un sac de rangement exclusivement réservé à tes souliers! Deuxième leçon : soit pas cheap! Parce que j’avais pris les sacs les moins dispendieux. Ceux que tu presses avec tes doigts bord en bord pour sceller, puis qu’il faut que tu repasses 3-4 fois pour être sûr que ce l’est. Disons que si t’es du genre à sacrer d’impatience quand vient le moment de fermer ton p’tit sac à sandwich, imagine quand c’est un méga sac jumbo à DOUBLE fermeture!!! En plus, après l’avoir bien scellé, je me rendais souvent compte que j’avais oublié quelque chose… Puis tout était à recommencer. Y’avait de quoi être exaspérée, et ça empiétait sur du temps de qualité à La Malbaie! J’aurais donc dû dépenser quelques dollars de plus pour des sacs à glissière style zipper. Ou mettre simplement le feu à mes Ziplocs, j’me le demande encore…

Outre la saga des sacs, j’avais même prévu un « plan de secours » fantaisiste, advenant le cas où j’aurais eu des piqûres. Je ne voulais clairement pas ramener de punaises chez moi, ni dans ma voiture. Nulle.part. Mon plan consistait donc à sortir dehors à la noirceur, presque nue, entourée seulement par la serviette fournie pour la douche, question de cacher l’essentiel. Rendue devant la valise de mon véhicule, j’aurais rapidement enfilé des vêtements laissés dans mon auto (anyways, y’a tellement de traîneries dans mon char que y’a toujours un peu de linge et une paire de souliers), puis j’aurais pris la fuite. PUIS FUCK LES ZIPLOCS! Je ne les aurais pas rapportés! J’avais tellement de difficulté à bien les sceller de toute façon que je me demande bien s’ils ont été d’une quelconque utilité!

Bien que loufoques, ces anecdotes n’ont pas été de tout repos dans mon cerveau. Et peut-être que de raconter ces histoires avec humour enlève de la crédibilité à mon anxiété, mais justement. L’humour, dans mon cas du moins, est le meilleur outil que j’ai développé pour la vaincre. C’est mon mécanisme de défense. Ma façon de dédramatiser. J’en ai presque fait un art que je maîtrise suffisamment pour berner certaines personnes qui ne me croient pas du tout anxieuse.

À part l’humour, me « connecter » avec la nature m’aide beaucoup. D’ailleurs, à La Malbaie, d’autres éléments anxiogènes se sont manifestés et à un moment, je me suis sentie submergée. Je suis donc allée longer le fleuve et je m’y suis arrêtée. Je me suis laissée bercer par le rythme des vagues et j’avais soudainement l’impression que mes problèmes étaient bien minuscules face à l’immensité du fleuve. Et j’ai pleuré. Ça m’a soulagée. J’ai compris qu’une fois de plus, mes inquiétudes étaient non fondées. Qu’au fond, tout avait bien été, mais que je n’arrivais pas à en profiter pleinement, car mon cerveau était toujours en mode alerte, en train d’appréhender le pire.

Puis j’ai décidé d’accepter ce que je venais de vivre. De ne pas me morfondre car je n’avais  pas vécu les « parfaites vacances ». Au contraire, elles m’ont beaucoup apporté. Et elles étaient parfaites. Car c’est à force d’affronter nos peurs que ces dernières diminuent. On commence par en affronter une petite, puis on s’attaque à une plus grosse, sans brusquer. On respecte notre rythme. Puis, on constate qu’on y survit. Puis un moment donné, on constate qu’on vit, tout simplement. Et dans ces moments où l’on sent qu’on ne peut y arriver seul(e), on n’hésite pas à demander de l’aide. Et finalement, à travers ce périple où je me suis confrontée à mon anxiété, je n’ai eu qu’une seule piqûre, celle de continuer ce grand voyage intérieur, en affrontant de petites et grandes situations qui m’amènent hors de ma zone de confort. Et qui sait, peut-être qu’à force de le faire, je finirai bien un jour par voyager seule hors du pays! ?

Crédit photo : Patricia Binet-Rioux

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