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La pression

J’ai lu dernièrement que, à l’âge de huit ans, une jeune fille sur trois est déjà préoccupée par son poids et a même déjà tenté de maigrir. Huit ans. Le choc que ça m’a fait, je ne vous dis même pas. J’ai d’abord été tentée de me dire que c’était à cause de la nouvelle génération de jeunes filles, de l’hypersexualisation et des mannequins populaires qui sont de plus en plus minces et conscientes de leur image. Ensuite, j’ai réfléchi un peu plus fort et j’ai compris que c’était là bien avant, mais différemment. J’ai pensé à mes huit ans à moi et puis tout est devenu clair soudainement. J’ai compris pourquoi, à 28 ans, je me compare encore aux autres. Pourquoi je m’empêche de porter certains vêtements parce qu’ils mettent l’accent sur certaines parties de mon corps.

On parle souvent des adolescentes obsédées par leur poids qui vont s’imposer des régimes extrêmes, vont calculer les calories ou, dans certains cas, iront même jusqu’à ingérer des laxatifs. C’est révoltant et inconcevable, mais l’adolescence étant ce qu’elle est, avec sa bonne dose de comportements excessifs, on est surpris, mais pas tant que ça, au fond. J’ai envie de vous parler de quelque chose d’un peu plus subtil, moi. J’ai envie de vous parler de maman. Ma mère, tout comme la tienne et celles de centaines de femmes de sa génération, était, elle aussi, victime d’une certaine pression sociale. À l’époque, je crois qu’on n’avait pas encore trop mis le doigt dessus, on ne parlait pas de ces choses-là ou peu. D’où je viens, du moins.

Je parle de maman et des femmes de son entourage qui gardaient les vêtements d’avant grossesse en manifestant tout haut le désir et l’ultime but de porter à nouveau ces vêtements. Si à cette époque j’avais été celle que je suis maintenant, j’aurais dit à maman et à toutes les autres que ce n’est pas réaliste, ce but. Que les hanches changent lorsqu’elles ont donné la vie et que c’est merveilleux, pas atterrant. J’aurais dit à toutes ces femmes que les barres énergétiques, ça peut remplacer un repas quand on n’a pas le choix, mais pas une alimentation complète. J’aurais dit à maman que les régimes postopératoires, la soupe au chou, les journées bananes et lait écrémé, et même le jeûne, ça envoie un message aux jeunes filles de huit ans qu’elles conserveront pour toute la vie, probablement. J’aurais sans doute aussi expliqué à maman que, lorsqu’elle manifeste la haine de son corps devant mes petits yeux, je m’enferme ensuite dans la salle de bain et je regarde mon corps d’enfant avec les mêmes critères.

Je l’aime, ma maman. Elle m’a enseigné la compassion, l’amour et, surtout, la rédemption. J’ai vu ma mère réussir à affronter une dizaine de moments difficiles avec fierté et force. Je ne blâme pas ma mère, bien au contraire. C’est une femme exceptionnelle qui a fait de moi celle que je suis aujourd’hui et je n’aurai jamais suffisamment de mots pour la remercier de la marque qu’elle a laissée en moi. À l’époque de mes huit ans, maman en avait presque 30. Est-ce que je blâme maman pour cette recherche de perfection présente en moi, maintenant que j’ai moi aussi presque 30 ans? Non. Je ne la blâme pas, j’essaie de comprendre pourquoi.

Je promets à mes futurs enfants et à tous les enfants pour qui je serai un jour un exemple d’apprendre du mieux que je peux à m’accepter. Si je n’y arrive pas ou peu, je promets de le manifester prudemment et avec les bons mots. Je promets de dire « Cette robe est très jolie sur toi » plutôt que « Tu es belle ». Je promets d’utiliser le mot « beauté » de la bonne façon, dans les bonnes situations et même de le remplacer par « santé » quand il le faut. Je promets de féliciter pour le talent, le travail ou les accomplissements plutôt que l’apparence physique. Je ne suis pas meilleure que personne, mais je promets de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour briser la chaîne et qu’enfin on relâche un peu cette pression qui pèse sur nos épaules. Ce sera ma petite contribution à moi.

Par Marie-Michelle Girard

Marie Lortie

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