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Vivre avec un trouble mental (ou comment réapprendre à vivre)

Du 7 au 13 mai se tiendra la 67eSemaine nationale de la santé mentale au Québec, organisée par le Mouvement Santé mentale Québec.

Ça fait vingt ans que je souffre d’anxiété et de dépressions passagères. Wow… vingt ans. Je ne l’avais pas réalisé avant de l’écrire. Vingt ans que c’est pas facile tous les jours, mais je suis tout de même chanceuse (si on peut dire) parce que je ne souffre que d’anxiété : il y a des cas bien plus lourds même si je peux vous assurer qu’être anxieux ou dépressif, c’est déjà pas le top.

Au début, c’est complètement déroutant… Qu’est-ce qu’il y a de pire que d’avoir l’impression que tu perds le contrôle de ton propre corps? Tu penses, penses et penses encore. Plus rien n’a vraiment de sens. Ton cerveau spin sans arrêt. Tout est trop.

J’ai toujours été curieuse et j’ai toujours fait tourner mon p’tit moteur cérébral ben vite, mais jamais j’aurais pensé que ça pouvait se rendre jusque là. Ton corps est tellement sollicité par l’angoisse qu’il est mort de fatigue, mais dormir… oublie ça! Pis si tu finis par y arriver, ton réveil est épouvantable : t’as un répit d’environ 10 secondes jusqu’à ce que ça reparte en vrille et que ton cerveau se mette à on pour une autre journée. Y’a pas de reset ou d’obsolescence programmée sur c’te p’tite affaire-là : t’es pogné avec. Pas de garantie, pas de retour de marchandise.

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Tu te mets à avoir peur de toi, peur des autres et à éviter toutes les situations qui étaient tellement ordinaires avant. Tu ressasses ton passé, tu veux mourir au présent pis t’oses pas penser au futur. T’as honte, pis t’acceptes pas… Des médicaments? Euh… NON! Je voulais RIEN savoir. Pour moi, c’était avouer que j’étais faible. Un jour, mon médecin m’a fait changer de perspective : elle m’a demandé si je trouvais épouvantable qu’un diabétique se pique à l’insuline chaque jour. Non? En quoi mon cas était-il si différent? Bonne question…

Pourquoi un dérèglement du cerveau est plus gênant qu’un dérèglement du pancréas? C’est un organe comme un autre… Certains diront qu’on a quand même plus de contrôle sur notre tête que sur nos autres organes. En effet : sur certaines choses. Je vous mets au défi de garder les yeux ouverts durant une minute sans jamais cligner des paupières. C’est pareil.

Par contre, on peut travailler sur notre comportement face à la situation, sur notre façon de la vivre et de la gérer. C’est beaucoup de travail sur soi, mais ça se fait. On passe tous par la phase « se rouler en boule dans un coin en pleurant sa vie », mais vient un moment où on doit se relever. On choisit de vivre ou non.

Il y a vingt ans, j’avais l’impression que ma vie était finie. Aujourd’hui, j’en apprécie chaque moment. Parce que, oui, ça se peut, être heureux quand même.

Trois choses m’ont sauvé la vie. Premièrement, j’aime beaucoup trop rire pis sous aucun prétexte ça pourrait s’arrêter. Ensuite, j’ai la chance d’être entourée de personnes merveilleuses qui ont toujours été là pour moi et finalement, j’ai toujours parlé ouvertement de ma situation. Mon côté volubile peut parfois déplaire, mais je l’assume complètement! En plus, ça a fini par aider d’autres personnes en cours de route.

Quand on a un trouble (quel mot poche) mental, on n’est pas tellement portés à prendre un porte-voix pour le crier en pleine rue. Mais quand on commence à parler de ce qu’on vit, c’est surprenant, les confidences qu’on reçoit. Les gens n’attendent souvent que le bon moment ou la bonne personne pour s’ouvrir… pis c’est rarement écrit dans leur face.

J’ai beaucoup d’amis dépressifs, bipolaires, atteints de TDAH ou avec des troubles de la personnalité. Ça ne fait pas d’eux des personnes moins allumées ou moins agréables : au contraire! Nous sommes un ensemble de ce que la nature nous a donné et de nos expériences antérieures. Je suis une personne spéciale dont la vie n’a pas toujours été rose, et loin de moi ici l’envie de faire pitié en rejetant le blâme sur la vie : j’ai aussi très souvent pris de mauvaises décisions. Mais ça donne la personne que je suis aujourd’hui. Sans tout ça, je ne serais pas aussi sensible, curieuse, ouverte d’esprit et reconnaissante de toutes les belles choses qui m’entourent.

Comme tout le monde, on a des hauts et des bas qu’on vit peut-être plus intensément que la moyenne des gens. On reste fragiles, on a souvent une piètre estime de nous-mêmes et l’impression qu’on n’est « pas assez ci » ou « trop ça ». On a tendance à s’en mettre beaucoup sur les épaules, à se trouver merdique et malheureusement, en périodes difficiles, on a souvent un penchant pour les excès… Soyez indulgents et ne tapez pas trop fort sur le clou : on le fait déjà bien assez par nous-mêmes.

Si vous connaissez des personnes atteintes d’un problème mental, c’est pas compliqué : soyez là. C’est tout. On ne vous demande pas de comprendre : seulement d’être une oreille attentive et de nous dire qu’on est donc ben beaux pis fins quand même!

Et à ceux qui ont un problème : parlez! Passez par-dessus la honte. Soyez fiers de qui vous êtes parce que la maladie n’est pas ce qui vous définit comme être humain. Entourez-vous des bonnes personnes et remerciez-les : c’est souvent aussi difficile pour eux que pour vous.

Sans mes amis et ma famille, je ne serais pas en train de vous écrire. Alors à tous ceux qui ont fait la différence dans ma vie, je vous aime et vous remercie de tout mon cœur! xxxxx

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